March 26, 2018
Première enquête d’opinion sur les exportations d’armes françaises, réalisée par YouGov pour SumOfUs
Paris, 26 mars 2018 – Une écrasante majorité de Français souhaitent un contrôle renforcé des exportations de matériel militaire par la France, selon une enquête d’opinion YouGov réalisée pour SumOfUs, ONG internationale qui agit comme un contre-pouvoir des grandes entreprises.
Ce sondage, réalisé à l’occasion du 3ème anniversaire de la campagne militaire d’une coalition de pays arabes au Yémen, auprès d’un échantillon de 1026 personnes représentatives de la population française, est la première enquête d’opinion réalisée en France sur les ventes d’armes. Le mois dernier, plus de 64.000 personnes avaient demandé au Président Emmanuel Macron de mettre un terme aux exportations d’armes à destination du Yémen, dans une pétition initiée par SumOfUs.
Le sondage révèle que :
- 88% des Français estiment que la France doit arrêter les exportations d’armes aux pays qui risquent de les utiliser contre des populations civiles.
- 75% pensent que la France doit suspendre ses ventes d’armes aux pays impliqués dans la guerre au Yémen.
- 74% jugent inacceptable que la France vende du matériel militaire à l’Arabie saoudite, 71% pour les Emirats arabes unis, deux clients importants de l’industrie d’armement française qui sont aussi les pays les plus impliqués dans le conflit au Yémen.
- 69% des Français sont favorables à un renforcement du rôle du Parlement dans le contrôle des ventes d'armes.
Isabelle Moussard-Carlsen, Directrice des opérations d’Action Contre la Faim :
« Au vu de ce sondage, il semble évident pour les Français que la vie des populations civiles doit primer sur les intérêts économiques de la France. Pourquoi le gouvernement est-il le seul à ne pas l’entendre ? Aujourd’hui, la situation humanitaire dramatique au Yémen doit amener à plus de considération et à des actes concrets pour la protection des civils. »
Aymeric Elluin, responsable plaidoyer armes et justice pour Amnesty International France :
« Depuis trois ans, Amnesty International appelle la France à suspendre ses transferts des armes à la coalition menée par l’Arabie saoudite. Nos recherches sur la souffrance des civils et les exactions commises par les parties au conflit démontrent qu’il existe un risque sérieux que ces armes soient utilisées pour commettre des violations graves du droit international humanitaire au Yémen. Ceci est inacceptable et contraire aux engagements internationaux de la France. »
Hélène Legeay, Responsable des programmes Maghreb/Moyen-Orient à l’ACAT :
« Face au sérieux doute pesant sur la légalité des exportations d’armement vers l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, il est indispensable que les parlementaires jouent leur rôle de contrôle de l’exécutif en créant une commission d’enquête parlementaire pour faire la vérité sur ce commerce des plus opaques. »
Françoise Sivignon, Présidente de Médecins du Monde :
« Les résultats sans ambiguïté de ce sondage montrent qu’il est nécessaire d’avoir plus de transparence, de débat et au fond plus de démocratie sur la nature des soutiens diplomatiques et économiques de la France avec des pays, dont certains ne respectent pas le droit international humanitaire »
Anne Héry, Directrice du plaidoyer de Handicap International :
« La France promeut le droit international humanitaire, et en même temps exporte des armes aux parties au conflit yéménite. C’est une contradiction inacceptable. Au Yémen, les civils sont les principales victimes des bombardements. La France doit entendre les résultats de ce sondage et se concentrer sur une action diplomatique renforcée pour faire cesser ce conflit. Handicap International soutient un plus grand rôle du Parlement dans la transparence et le contrôle des ventes d’armes ».
Abdessalam Kleiche, Vice-Président de l’Alliance internationale pour la défense des droits et libertés (AIDL) :
« Aujourd’hui, l’opinion publique ne tolère plus que la coalition menée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, continue à bombarder la population civile au Yémen, à détruire des infrastructures tels que des hôpitaux et des écoles, et un patrimoine millénaire, en utilisant des armes vendues par les puissances occidentales notamment la France. Par ce sondage, les citoyennes et les citoyens rappellent aux parlementaires leur devoir d’interpellation du gouvernement français et donc la nécessité d’avoir un débat public quant au niveau d’implication de la France dans cette guerre. »
Eoin Dubsky, Responsable de campagnes chez SumOfUs :
« Plus de 64 000 membres de SumOfUs demandent au président Macron de mettre immédiatement un terme à l'exportation d'armes française vers les pétromonarchies du Golfe qui mènent la guerre au Yémen et qui dirigent leur arsenal militaire contre les populations civiles. Les résultats de ce sondage inédit montrent que c’est une opinion partagée par une partie écrasante des Français. A l’occasion du 3ème anniversaire de la guerre menée par l’Arabie saoudite au Yémen, il est grand temps que le gouvernement entende ce message. Emmanuel Macron qui se présente aux yeux du monde comme un président humaniste doit passer de la parole aux actes.
Nous espérons également que cette campagne permettra de questionner le poids démesuré de l’industrie de l'armement en France. Un vrai contrôle démocratique doit commencer à s’exercer sur ces exportations qui se font aujourd’hui dans l’opacité. L’humain doit définitivement passer avant le profit. »
NOTE AUX REDACTIONS
Méthodologie du sondage YouGov (voir résultats détaillés)
Sondage effectué en ligne, en France, du 20 au 21 mars 2018, auprès d’un échantillon de 1026 personnes représentatives de la population française (18+), sur le panel propriétaire de YouGov. Les données sont pondérées pour être représentatives des adultes français.
Eléments de contexte sur la guerre au Yémen
88% des personnes interrogées par YouGov estiment que la France doit arrêter ses exportations d'armes aux pays qui risquent de les utiliser contre des populations civiles.
Contexte :
- Selon le bureau du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme, près de 6000 civils ont été tués au Yémen depuis le lancement, le 26 mars 2015, de la campagne militaire d’une coalition de pays arabes menée par l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.
- Des milliers d’autres civils sont morts du fait de la crise humanitaire qui ravage le pays et qui est notamment le fruit des restrictions posées par la coalition à l’acheminement de l’aide humanitaire et des biens commerciaux de première nécessité.
74% des Français jugent inacceptable que la France vende du matériel militaire à l’Arabie saoudite, 71% des Français jugent inacceptable que la France vende du matériel militaire aux Emirats arabes unis.
Contexte :
- L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont les deux principaux acteurs de la coalition de pays arabes (composée également de Bahreïn, l’Egypte, la Jordanie, le Koweït, le Maroc, le Pakistan, le Soudan) qui a lancé une offensive militaire au Yémen le 26 mars 2015 contre les rebelles Houthis qui s’étaient emparés de la capitale Sana’a. Trois ans plus tard, le conflit est toujours en cours et a créé la plus grave crise humanitaire au monde, selon l’ONU. 3 Yéménites sur 4 (22 millions de personnes) dépendent de l’aide extérieure et 8,4 millions sont au bord de la famine.
- Depuis le début du conflit, tant les ONG locales et internationales que les Nations Unies alertent sur les violations graves du droit international humanitaire vraisemblablement commises par l’ensemble des belligérants, notamment par les pays membres de la coalition.
- L’Arabie saoudite et les Emirats sont parmi les principaux clients de l’industrie d’armement française. L’Arabie saoudite est le 2ème acheteur d’armes françaises, les Emirats se placent au 6ème rang pour la période 2007-2016.
75% des sondés pensent que la France doit suspendre ses ventes d’armes aux pays impliqués dans la guerre au Yémen
Contexte :
- Une étude juridique du cabinet Ancile Avocats révèle un manque de transparence de la part des autorités françaises au sujet des transferts d’armes à l’Arabie saoudite et aux EAU depuis le début du conflit au Yémen, alors qu’il existe un risque juridiquement élevé que certains de ces transferts soient illégaux, au regard des engagements internationaux de la France en vertu du traité sur le commerce des armes et de la position commune de l’Union européenne.
- Plusieurs pays européens dont l’Allemagne, la Norvège et la Belgique ont pris des mesures limitant leurs exportations d’armes en raison du risque qu’elles soient utilisées contre des civils au Yémen.
69% des Français sont favorables à un renforcement du rôle du Parlement dans le contrôle des ventes d'armes.
Contexte :
- Chaque année, le ministère des Armées présente au Parlement français, au plus tard le 1er juin, un rapport sur les exportations d’armement de la France. Le rapport ne fournit pas d’informations permettant de s’assurer que la France respecte ses engagements internationaux.
- Le rapport au parlement ne permet pas de savoir précisément quels matériels militaires (armes, pièces, composants, munitions) et quelles prestations d’assistance technique et de formations (depuis juillet 2017, certaines formations opérationnelles liées à l’utilisation de matériels de guerre sont soumises à autorisation d’exportation) ont fait l’objet de licences d’exportation, de contrats et de livraisons effectives vers tel ou tel pays. Ni de savoir à quel destinataire, utilisateur final, ils sont destinés et pour quel type d’utilisation finale.